CPF : l’idée d’un « 30 % de reste à charge » provoque des remous
Par Philippe Guerrier | Le | Droit de la formation
Le gouvernement souhaite introduire un reste à charge de 30 % sur le CPF qui serait apporté par le salarié pour exploiter Mon Compte Formation. La fédération Les Acteurs de la Compétence monte au créneau.
C’est une perspective qui prête à polémique pour l’exploitation de Mon Compte Formation : « un reste à charge de 30 % sur le CPF ». Jusqu’ici, son usage reposait sur un mode de gratuité pour le titulaire individuel du compte.
Ce changement de modèle a été évoqué par Bruno Le Maire, ministre de l’Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique, lors d’un passage radio sur France Culture le 9 mai.
Auparavant, ce sujet a été introduit au détour d’un amendement déposé par le gouvernement le 10 décembre 2022 au Projet de loi de finances pour 2023 (PLF 2023) pour instaurer un « reste à charge » du salarié lors de l’utilisation de son CPF.
L’amendement précise que la participation sera versée quel que soit le montant des droits disponibles sur le compte. Mais, on ne sait pas encore si le reste à charge sera proportionnel au coût de la formation ou forfaitaire. Les demandeurs d’emploi seront cependant exemptés de cette obligation.
Les précisions seront apportées dans un décret à venir.
Reste à charge de 30 % sur le CPF : l’inquiétude des professionnels de la formation
Mais cette transition envisagée entraîne des réactions exprimant une certaine préoccupation. Ainsi, la fédération Les Acteurs de la Compétence (1ère fédération des entreprises de formation) évoque une « profonde inquiétude sur l’impact de cette mesure sur la compétitivité de notre économie et pour le plein emploi ».
Selon son président Christopher Sullivan,
- « Le CPF est un moyen de lutter contre le chômage et de donner aux actifs les compétences nécessaires à l’évolution des métiers. Exiger une contribution financière de 30 % sur leur droit à la formation professionnelle, notamment pour les catégories sociaux-professionnelles les plus fragilisées, est un non-sens qui met en danger la compétitivité de notre économie et l’accompagnement des trajectoires professionnelles.
- Il est nécessaire de favoriser des mécanismes d’abondements prévus par la loi de 2018, tels que le co-investissement employeur/salarié et les abondements des Régions, collectivités territoriales et autres acteurs ».
Elle espère que le gouvernement mettra en œuvre « une démarche de concertation avec les partenaires sociaux » sur ce sujet.
Selon un décompte officiel relatif à l’exploitation de Mon Compte Formation remontant à juillet 2022, on recense :
- 4,53 millions de dossiers CPF acceptés via la plateforme « mon compte formation » depuis novembre 2019;
- 6 milliards d’euros dépensés ;
- Un montant moyen des achats de formation de 1334 euros ;
- 38,9 millions de titulaires de comptes CPF alimentés (secteurs privé et public).
CPF : que prévoit la version 10 des conditions d’utilisation ?
Les conditions d’utilisation du service Mon Compte Formation évoluent pour les titulaires et pour les organismes de formation à compter de mai 2023, indique la Caisse des Dépôts, qui gère Mon Compte Formation.
• De nouveaux cas de force majeure permettent aux stagiaires de ne pas être considérés comme responsables de la non-exécution d’une formation : congés maternité ou paternité, maladie ou hospitalisation des ascendants et descendants.
• Un cas de force majeure en cas d’empêchement à utiliser les locaux pour l’organisme de formation lors, par exemple, d’une catastrophe naturelle, d’un incendie ou de dégradations diverses a été ajouté.
Par ailleurs, la V10 prévoit intègre d’autres changements qui portent sur :
- des modifications à apporter sur le portail EODF qui abrite les espace réservés des organismes de formation pour alimenter leur catalogue d’actions éligibles au CPF ;
- des précisions à apporter lors de l’inscription sur cet espace professionnel;
- une autorisation d’accès à la CDC en vue d’une réintégration au dispositif après une période d’exclusion.
- Adaptation d’articles de News Tank RH diffusés entre le 09/05 et 16/05/2023. Pour accéder à l’offre Découverte et découvrir l’intégralité de la couverture éditoriale sur le CPF.
- Inclu : « Reste à charge du CPF : une légitimité théorique qui ne résiste pas à sa portée pratique », une analyse de Jean-Pierre Willems (Chargé d’enseignement politiques droit et pratiques de formation - master DRH @ Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne) pour News Tank en date du 15/05/2023.