Tribune - Sommes-nous tous des entrepreneurs ?
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50 % des jeunes français voudraient devenir entrepreneurs, les positions non salariées sont appelées à se généraliser, nous serons sans doute tous demain plus libres de nos places au travail… Pour autant, sommes-nous tous entrepreneurs ? Sommes-nous capables de l’être et jusqu’où ? Qu’est-ce qui fait vraiment l’entrepreneur ? Et qu’est-ce qui distingue un « auto-entrepreneur », capable de fabriquer son propre job, d’un entrepreneur à part entière, capable de créer, de développer une entreprise et de porter une aventure collective
?
On ne fabrique pas un entrepreneur comme on peut former des développeurs, par exemple, ou même des managers. S’il est bien une fonction qui suppose en soi, profondément, dans son ADN, les « drivers » nécessaires, c’est bien la fonction d’entrepreneur. Ce n’est pas seulement une compétence, ni un passage obligé pour cadres dirigeants, ni une sorte de « must » universel, c’est une posture fondamentale de l’individu, pour une place au travail à part entière. Et cette place suppose, pour être occupée avec succès, des clés de motivation plutôt rares et très spécifiques : une indépendance viscérale, un sens aigu du résultat concret, une envie d’expression personnelle profonde, une indifférence au risque, une polyvalence naturelle, une énergie de réalisation exceptionnelle… rien - par nature - de ce que l’on peut enseigner facilement à l’école ou à l’université, des qualités qu’on peut seulement révéler, affiner, encourager…
Si nous voulons ainsi plus d’entrepreneurs, à quelque titre que ce soit, il nous faut apprendre à les repérer, comme on repère de futurs champions de tennis, de football ou de natation. Il nous faut comprendre comment les suivre, les aider, leur permettre de croître et d’expérimenter. Or, à l’école comme en entreprise, les systèmes - normatifs par nature - tendent plutôt à lisser les différences et susciter de l’obéissance. Alors que l’entrepreneur justement n’aime la norme que si c’est la sienne, et n’obéit volontiers qu’à ses propres critères. Pourtant, si on ne protège pas ces profils dont collectivement nous avons si cruellement besoin, si on ne se donne pas les moyens de les détecter et de les encourager, en respectant leurs logiques et en leur donnant les clés spécifiques qui leur font encore défaut, nous prenons le risque majeur de les voir s’ennuyer, se résigner… ou déserter. Vers des contrées plus ouvertes, ou tout au moins perçues comme telles.
Que nous en soyons conscients ou non, nous avons profondément besoin d’entrepreneurs. Bonne nouvelle : ceux que nous recherchons sont sans doute déjà là, tout près, mais ils ont encore besoin de nous, de notre regard, de notre aide, de nos compétences, de notre vécu, de notre appui. Apprenons ainsi à les révéler et à les accompagner, pour mieux les conserver et les faire grandir. Faisons-les profiter de nos expériences. Donnons-leur le droit à l’erreur pour leur permettre d’apprendre en cheminant. Donnons-leur aussi le droit de réussir pour leur permettre d’exprimer tout leur talent et tout leur potentiel. Pour eux comme pour tous.
Le futur du pays, sa richesse, son équilibre, son dynamisme sont sans doute à ce prix…
Nadia Nardonnet - Directrice Générale - PerformanSe, évaluation et développement des compétences en milieu professionnel.