Les salariés prêts à co-financer leurs formations ?
Le | Droit de la formation
Fin juin, Cegos dévoilait les résultats de son étude annuelle « Transformations, compétences et learning », menée auprès de milliers de salariés et DRH. Parmi les enseignements notables, on apprend que 42 % des salariés français se disent prêts à financer eux-mêmes une partie du coût de leurs sessions de formation professionnelle : c’est 15 points de plus que l’an dernier. Une révolution culturelle est-elle en cours
?
Le financement personnel fait son bout de chemin
Lorsque l’observatoire Cegos a interrogé des salariés européens en avril dernier, 11 % des Français se sont déclarés « tout à fait prêts » et 31 % « plutôt prêts » à mettre la main à la poche pour se former. Autrement dit, 42 % des Français apparaissent ouverts à cette idée en 2018, contre seulement 27 % en 2017. On est certes encore loin de la moyenne européenne qui s’élève à 53 % (Allemagne, Espagne, Italie, Royaume-Uni confondus) … mais ce bond de 15 points reste très significatif dans un pays comme le nôtre, où l’entreprise a toujours eu un rôle prégnant dans l’histoire de la formation professionnelle. « L’explication est en partie sociologique : les salariés ne se projettent plus dans des trajectoires de vies constantes et planifiées. Dans le monde du travail, beaucoup ont déjà vécu des ruptures et savent qu’ils en vivront d’autres. Les salariés gagnent en autonomie vis-à-vis de leur propre projet, qui a tendance à se déconnecter de l’entreprise », analyse Mathilde Bourdat, responsable de l’offre formation de Cegos. A noter toutefois qu’il existe une importante différence de perception selon les profils : plus de la moitié des managers se disent prêts à co-financer, contre moins de 30 % des non-managers. Pas vraiment surprenant selon Cegos : « les managers ont des gestions plus individuelles de leur carrière en dehors de l’entreprise et ils ont aussi plus de moyens financiers », observe l’experte.
Monétisation du CPF : les salariés prêts à davantage d’autonomie
Autre indicateur en progression : 70 % des salariés français sont désormais prêts à se former hors du temps de travail (et donc sur leur temps personnel), contre 56 % en 2016 et 64 % l’an dernier. D’ailleurs, une large majorité considère aujourd’hui que la formation professionnelle est une responsabilité partagée entre l’entreprise et le collaborateur. La future monétisation du CPF, qui transformera les heures de formation en euros sonnants et trébuchants, fera-t-elle évoluer les comportements des salariés français ? L’étude Cegos montre déjà que 38 % des salariés entendent dépenser leur crédit CPF pour un projet professionnel, contre 31 % pour un projet personnel. « La monétisation du CPF va certainement mener à des comportements plus individuels et des stratégies plus personnelles. Les salariés vont se rendre compte qu’ils ont de l’argent, qu’ils vont vouloir dépenser pour eux-mêmes. Charge aux employeurs de trouver un champ de négociation gagnant-gagnant [pour abonder le coût de certaines formations jugées utiles pour l’entreprise] », parie Mathilde Bourdat. De même, si plus de la moitié des salariés interrogés pense différer l’utilisation du budget CPF le temps de se constituer un capital, l’effet « compte en euros » pourrait bien précipiter les projets de formation de certains.
Gaëlle Fillion