Inégalité salariale : une salariée peut demander la transmission de bulletins de paie comme preuve
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Au nom du droit à la preuve, la Cour de cassation a jugé qu’une salariée licenciée qui considérait avoir subi une inégalité salariale pouvait obtenir la communication des bulletins de salaires de huit autres salariés occupant des postes de niveau comparable.
C’est une jurisprudence intéressante à suivre dans le débat sur les inégalités salariales entre les hommes et les femmes.
Une salariée peut demander la communication de bulletins de salaire d’autres salariés avant tout procès afin de démontrer l’existence d’une inégalité salariale par rapport à certains collègues masculins ayant occupé des fonctions similaires, selon la Cour de cassation dans un arrêt du 8 mars 2023.
Les principaux points du dossier
- Une salariée est embauchée le 5 janvier 2009 en qualité de structureur (élaboration de produits financiers complexes pour le compte de clients institutionnels).
- Elle est nommée directrice stratégie et projets groupe le 23 janvier 2017.
- Elle est licenciée le 2 février 2019. Elle saisit le CPH en référé, afin d’obtenir la communication de bulletins de salaires d’autres salariés, considérant avoir subi une inégalité salariale par rapport à certains collègues masculins occupant ou ayant occupé des postes de COO.
- Dans un arrêt du 3 décembre 2020, la Cour d’appel de Paris fait droit à sa demande.
- Elle constate que la salariée demande la communication des bulletins de salaires de huit autres salariés occupant des postes de niveau comparable au sien, dans des fonctions d’encadrement, commerciales ou de marché, avec occultation des données personnelles à l’exception des noms et prénoms, classification conventionnelle, rémunération mensuelle détaillée et rémunération brute totale cumulée par année civile.
- Elle juge que la communication de ces éléments, portant atteinte à la vie personnelle d’autres salariés, est indispensable à l’exercice du droit à la preuve et proportionnée au but poursuivi, à savoir la défense de l’intérêt légitime de la salariée à l’égalité de traitement entre hommes et femmes en matière d’emploi et de travail.
- Dans un arrêt du 8 mars 2023, la Cour de cassation confirme l’arrêt d’appel. Elle rappelle qu’il appartient au juge, saisi d’une demande de communication de pièces, de rechercher :
- Si cette communication est nécessaire à l’exercice du droit à la preuve de l’inégalité de traitement alléguée et proportionnée au but poursuivi ;
- S’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige ;
- Si les éléments demandés sont de nature à porter atteinte à la vie personnelle d’autres salariés, le juge peut cantonner le périmètre de la production des pièces sollicitée.
Elle rappelle également que le droit à la protection des données à caractère personnel n’est pas un droit absolu et doit être mis en balance avec d’autres droits fondamentaux.
Elle constate que la demande de communication de la salariée est nécessaire à l’exercice de son droit à la preuve et proportionnée au but recherché. Elle juge donc que la demande de communication est recevable.
Éclairage juridique
Adaptation d’un article de News Tank RH publié le 16/03/2023. Pour accéder à l’offre Découverte avec toutes les analyses juridiques du domaine RH et la couverture globale de l’équipe éditoriale.