UPNE : ce syndicat pro-intérim digital veut peser dans le débat sur les plateformes d’emplois
Par Philippe Guerrier | Le | Intérim
Gojob, MisterTemp, Side, et Comet fondent l’Union des Plateformes Numériques pour l’Emploi (UPNE) et prônent une vision « moderne, fraternelle et sociale » du monde du travail.
C’est un nouvel épisode dans la bataille des plateformes d’intermédiation pour l’accès à l’emploi des travailleurs indépendants. Un nouveau syndicat professionnel émerge sous la houlette d’un quatuor de sociétés technologiques souhaitant faire bouger les lignes.
Les agences d’intérim digital Gojob, MisterTemp et Side, et la plateforme des freelances Comet s’unissent au sein de l’Union des Plateformes Numériques pour l’Emploi ou UPNE.
« Fruit d’une réflexion initié il y a plusieurs mois avec Alexandre Pham [co-président de MisterTemp], David Benzaken [cofondateur de Side.co], et Eric Didier [cofondateur et COO de Comet], ces fondateurs des plateformes d’emploi veulent changer le monde. L’UPNE milite pour un emploi plus responsable. Innovant, adapté aux changements de notre monde, mais sans laisser pour compte l’humain et le modèle social qui sont les fondements de notre démocratie et de la fraternité qui lie le peuple français », évoque Pascal Lorne dans une contribution sur son compte LinkedIn en date du 31 mars.
« Eviter les effets de bord avec le monde du travail qui change »
Pour RH Matin, le CEO fondateur de Gojob, qui a pris les fonctions de président de l’UPNE, précise la portée de cette nouvelle initiative.
« Le monde du travail change et les formes de contractualisation doivent évoluer également. Nous voyons des changements que je qualifierais de ‘sauvages’. Normal car c’est le propre de l’innovation. Mais nous avons l’impression que tout le monde se fait rattraper avec des effets de bord avec pleins d’initiatives pour l’emploi mais certaines prennent une forme d’esclavagisme moderne. »
Avec l’UPNE qui sera rejoint par d’autres acteurs « très bientôt », l’objectif est de « structurer une parole accessible et compréhensible par le grand public, les entreprises et les pouvoirs publics à commencer par le gouvernement » sur « une vision moderne, fraternelle et sociale » de l’évolution du monde du travail.
Pascal Lorne souligne la dimension de « flexibilité » à la fois du côté des entreprises et des travailleurs indépendants qui reprennent leur destin en main :
- choix du congé ;
- choix des clients ;
- choix du salaire ;
- couverture sociale appropriée.
Plateformes d’emplois : « Sortir des zones grises et noires »
L’UPNE émerge dans un contexte particulier de tension sur la question du statut des travailleurs indépendants et de l’accès à l’emploi entre « zones grises et noires ».
- le rapport Frouin, rendu au gouvernement français fin 2020, portait sur la manière de « sécuriser les relations juridiques et les travailleurs sans remettre en cause la flexibilité apportée par le statut d’indépendant » ;
- le projet d’ordonnance portant sur les modalités de représentation des travailleurs indépendants et de dialogue social au sein des plateformes numériques d’emploi (VTC et livreurs) piloté par Bruno Mettling (président de Topics, cabinet de conseil en stratégie de transformation sociale et digitale) dans le cadre d’une mission gouvernementale supervisée par le ministère du Travail, de l’Emploi et de l’Insertion ;
- une « coordination visant à uniformiser le statut » des travailleurs indépendants au sein de l’UE.
UPNE vs API : « Un combat différent »
Même si les trois agences d’intérim digital membres fondateurs de l’UPNE (Gojob, MisterTemp et Side) sont rattachées à Prism’emploi, elles refusent toute affiliation avec l’organisation professionnelle de référence dans le secteur de l’intérim.
« Nous sommes indépendants vis-à-vis de Prism’emploi, même si nous nous rejoignons sur beaucoup de sujets », précise Pascal Lorne.
Difficile de ne pas faire un lien entre la création de l’UPNE et l’activisme de l’Association des Plateformes d’Indépendants (API), fondée par Hervé Novelli en novembre 2019.
L’ex-secrétaire d’Etat chargé des PME, qui avait érigé en 2008 le statut d’autoentrepreneur (on dit microentrepreneur depuis 2016), s’appuie sur ce club d’une vingtaine de membres comme Deliveroo, Uber, Stuart (filiale du groupe La Poste) dans la livraison de repas ou de colis mais aussi StudentPop, StaffMe, Brigad et Freelance.com dans l’intermédiation avec les travailleurs indépendants.
Dans ses statuts, l’API et les plateformes adhérentes veulent « faire entendre leur voix, de défendre leurs spécificités et de contribuer à l’invention du travail indépendant de demain, notamment via une charte de bonnes pratiques ».
« Nous ne nous inscrivons pas dans une démarche manichéenne », se défend Pascal Lorne au nom de l’UPNE. « Les membres de l’API défendent leurs propres intérêts en commun. Ils ne sont pas diamétralement opposés aux nôtres mais nous n’avons pas le même champ d’application et nous ne menons pas le même combat », commente le président du nouveau syndicat.
Néanmoins, une position ferme et assumée est prise contre la tendance à « l’ubérisation » des activités professionnelles et à la précarisation inhérente des conditions de travail.