Jenny Gaultier, Le Mercato de l’Emploi : « Nous sommes le recruteur du dernier kilomètre »
Par Philippe Guerrier | Le | Site emploi spécialisé
La directrice générale et cofondatrice du Mercato de l’Emploi, du nom d’un réseau de recruteurs indépendants, a acquis son concurrent Solinki. Quels sont les contours de ce rapprochement ?
Comment le rapprochement entre Le Mercato de l’Emploi et Solinki s’est-il réalisé ?
30 recruteurs de Solinki sur 50 rejoignent notre réseau.
Le bouclage de l’opération de croissance externe a été réalisé fin octobre 2024. C’était notre principal concurrent sur le segment du réseau de recruteurs indépendants alors que nous avions lancé nos activités respectives de manière simultanée en 2017.
Notre levée de fonds réalisée en 2022 a permis d’accélérer et de disposer désormais de près de 600 recruteurs. La stratégie de Solinki a été différente, c’est ce qui a certainement joué en leur défaveur.
Avec son rachat, nous consolidons notre position et accélérons sur le marché avec une base supplémentaire de recruteurs expérimentés. 30 recruteurs de Solinki sur 50 rejoignent notre réseau. C’est une opportunité pour eux : les recruteurs disposent d’outils plus puissants et de tarifs plus avantageux chez Le Mercato de l’Emploi.
D’un point de vue géographique, nous approfondissons nos ancrages régionaux.
- Solinki était bien implanté en Auvergne-Rhône-Alpes et en Île-de-France par exemple.
- Le Mercato de l’Emploi est bien représenté en région Nouvelle-Aquitaine.
Nous avons aussi bien préparé l’onboarding, la passation entre la direction de Solinki et celle du Mercato de l’Emploi et les modalités d’intégration.
Quelles étaient les grandes différences de modèles économiques entre les 2 réseaux ?
Les modèles similaires tournaient autour d’un abonnement par recruteur pour faire partie du réseau. Mais le tarif était plus important chez Solinki : 450 euros Solinki vs 150 euros chez Le Mercato de l’Emploi. En contrepartie, Solinki prenait peu de commission sur CA.
Avec le Mercato de l’Emploi, nous misons davantage sur leur réussite à long terme avec un système de paliers qui permet de reverser entre 70 % et 90 % de leur CA.
Pour exercer leur métier de recruteur, nous proposons aussi des outils digitaux plus performants en propre pour le recrutement (ATS), le suivi des candidats (CRM) et le pilotage des activités. Nous avions commencé à développer une plateforme unique en novembre 2022 en intégrant l’IA. La nouvelle version de l’outil est disponible depuis le début de l’année 2024.
Les conditions que nous avons signées avec Solinki permet à ses recruteurs d’éviter de verser des frais d’adhésion (3000 euros). C’était aussi un moyen de leur donner envie de nous rejoindre.
Depuis votre levée de fonds en 2022 (8 millions d’euros), Le Mercato de l’Emploi est-il en phase avec ses prévisions de business ?
C’est plutôt bien. En 2024, nous devrions afficher un CA autour de 15 millions d’euros et visons les 30 millions pour 2025.
Avec notre modèle de réseau de recruteurs indépendants que nous démocratisons, nous résistons bien à la crise. Nous sommes présents sur tous les territoires et nous ne dépendons pas d’un secteur d’activité.
Environ 30 % du business est réalisé sous forme de partage de revenus entre recruteurs. Ce type de synergie représente une des clés du succès de notre modèle de développement.
Comment parvenez-vous à vous distinguer par rapport aux autres profils de recruteurs : réseaux de travail intérimaire, job boards, cabinets de recrutement… ?
C’est rare d’être en concurrence avec ces acteurs. La force de Mercato de l’Emploi, c’est la proximité géographique, c’est-à-dire que nous sommes le recruteur du dernier kilomètre qui connaît bien le tissu d’entreprises.
- Nous considérons les job boards (Indeed, Meteojob, Figaro Classifieds…) comme des partenaires pour sourcer des candidats. Le recrutement ne représente qu’une petite partie de l’activité des réseaux de travail intérimaire.
- Quant aux grands cabinets de recrutement, ils se concentrent sur des gros clients dans des grands bassins d’emploi.
Le marché que nous voulons ouvrir, c’est celui des entreprises qui ne disposent pas d’intermédiaires de recrutement.
70 % des recrutements réalisés via Le Mercato de l’Emploi concernent des cols bleus, le reste (30 %) étant un mix de cadres dirigeants, de cadres ou de personnes occupant des fonctions de support.
Exploitez-vous votre propre job board ?
• Nous parlons davantage en site carrière par recruteur. Cela va plus loin depuis 2 mois : nous proposons un site Web de recherche d’emploi par recruteur via le site Web du Mercato de l’Emploi.
• Il peut lui-même l’administrer, créer des contenus, mettre en avant ses spécialisations et s’assurer du référencement unique sur son territoire.
Comment intégrez-vous l’IA dans vos activités de recrutement ?
C’est intéressant en termes d’évolution du marché : nous assistons à une mutation en termes de pratiques et d’usages numériques dans le recrutement afin d’aller chercher davantage de performance. Notamment à travers l’exploitation de l’IA, qui va permettre au recruteur des tâches chronophages et de se concentrer sur son vrai métier à la rencontre des entreprises et des candidats.
Nous travaillons avec ChatGPT d’OpenAI dans un premier temps.
L’IA devrait libérer du temps au recruteur afin qu’il dispose de plus de temps pour voir les clients et les candidats. Elle devrait devenir un véritable assistant pour générer des briefs clients et des offres d’emploi. Nous sommes en train de tester divers outils de matching par IA.
Votre réseau de recruteurs est-il sensible à l’atout IA dans leur profession ?
Cela peut faire peur au départ mais nous les formons en permanence. Une trentaine de recruteurs servent de bêta-testeurs pour les prototypes. Ils servent d’ambassadeurs auprès du réseau. Si cela marche bien, nous passons à la phase de déploiement.
Par exemple, pour le matching CV, nous faisons tourner 2 modules en même temps et nous comparons les performances pour retenir le meilleur.