La révolution du social learning
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Karie Willyerd, vice-presidente de SuccessFactors, est une visionnaire. Cette ancienne directrice de la formation chez Sun Microsystems a créé en 2010, Jambok*, une plate-forme de social learning très innovante. La même année, elle publiait The 2020 Workplace, un ouvrage remarqué. Nous avons eu la chance de la rencontrer lors du dernier Congrès HR
L’arrivée de la fameuse génération Y dans les entreprises est une donnée clé. « Entre 2010 et 2020, le visage de nos entreprises va changer. En 2010, les baby-boomers étaient majoritaires ; en 2020, les représentants de la génération Y le seront » annonce Karie Willyerd. Or cette génération née après 1977 utilise massivement les réseaux sociaux. Les chiffres d’une étude Cisco sont sans appel : 67 % des candidats Y demandent durant un entretien si l’accès aux réseaux sociaux est autorisé dans l’entreprise ; 50 % préfèrent perdre leur portefeuille que leur smartphone ; 70 % ne juge pas utile de venir travailler au bureau…
La vidéo pour former
Comment proposer alors des outils adaptés aux nouvelles attentes de cette génération ? Le domaine de la formation est bel exemple. Depuis des siècles, l’échange entre deux personnes est la meilleure façon d’apprendre. « L’e-learning a montré ses limites, une machine ne peut remplacer l’interaction humaine » constate Karie Willyerd. La vidéo, par contre, est un support plébiscité par la génération Y. 4 milliards de vidéos sont visionnées chaque jour sur YouTube ! La vidéo présente trois avantages. D’abord, elle peut être vue partout sur un iPhone, sur Facebook, sur une tablette. Ensuite, elle se regarde vite. Une capsule peut durer 1min30. Enfin, elle peut être revue aussi souvent que nécessaire. « Certaines personnes pour apprendre ont besoin de répétition », ajoute Karie Willyerd.
La génération Y utilise de moins en moins l’email. « Elle communique par sms ou message sur Facebook en recommandant des liens ou des vidéos » Pour eux, l’email avec des pièces jointes indigestes, c’est le bureau. La nouvelle génération de plate-forme de formation doit intégrer cette nouvelle donne et proposer des moyens de communication plus interactifs.
Une formation « peer to peer »
La production de la formation va être aussi bouleversée. Les vérités assénées par des autorités se révèlent en fait moins efficaces. « Le meilleur formateur est probablement votre collègue », explique Karie Willyerd. Les plate-formes LMS sociales doivent favoriser cette génération de contenu de formation par les employés. Un exemple ? Une chaîne de grande distribution américaine a incité ses employés les plus performants à livrer leurs « secrets » dans des courtes vidéo réalisées depuis leur smartphone et postées en ligne. La vidéo d’un boulanger livrant ses astuces de présentation pour augmenter ses ventes a été vue et revue par l’ensemble des boulangers de tous les magasins à travers le pays. Résultat : +30 % de ventes le mois d’après pour les rayons boulangerie. « Et qu’est-ce que cela coûte de tenter l’expérience ? » demande Karie Willyerd.
Le social learning va fortement impacter les plate-formes LMS dans les prochaines années. Mais il pourrait aller plus loin en bouleversant le business model même de la formation. « Le succès de la Khan Academy est un exemple de l’arrivée de ces nouvelles approches » conclut Karie Willyerd. La Khan Academy propose 3 600 cours en vidéo sur YouTube. Elle accueille 6,5 millions de visiteurs uniques chaque mois et ses vidéo ont été vues plus de 200 millions de fois. Et tout est gratuit….
* : Jambok a été racheté par Successfactors en mars 2011
Laurent Pilliet