Les MOOC, futur outil de sourcing des entreprises ?
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Plus qu’un concept à la mode, les Massive Open Online Course (MOOC) laissent présager l’émergence de tendances de fond en matière de recrutement. En plus de bouleverser les modèles de formation, ces cours en ligne gratuits s’apprêtent à redéfinir les méthodes de sourcing des entreprises ainsi que les liens qui les unissent au monde de l’enseignement
MOOC, un buzz word qui affole la sphère ? Pas que. « Nous assistons à l’émergence d’un phénomène qui va rapidement imposer aux écoles de revoir leurs modèles pédagogiques et aux entreprises de repenser leurs méthodes de recrutement », estime Gilbert Azoulay, directeur éditorial de l’agence Quatre Vents qui organisait, début février, une table-ronde sur la thématique des MOOC. Car d’ici à ce que ces cours en ligne gratuits, qui aboutissent à l’obtention d’une certification payante, soient utilisés à des fins de recrutement, il n’y a qu’un pas. Certaines entreprises comme Google ou Facebook investissent d’ores et déjà les plateformes Udacity et Coursera pour lancer leurs propres MOOC. L’objectif ? Identifier des talents et évaluer leurs compétences, à la manière d’un assessment center. Et, de fait, élargir sa base de recrutement à l’échelle internationale. Pour que cet usage se généralise, « cela suppose que les entreprises françaises arrêtent de se focaliser sur le diplôme d’un candidat ou la réputation de son école et privilégient le résultat qu’il obtient à sa certification », tempère Jean-Noël Thiollier, DRH de Tech Data. Reste que si, à l’avenir, les entreprises produisent elles-mêmes leurs MOOC, « elles entreront dans une logique de concurrence avec les écoles et les organismes de formation », constate Gilbert Azoulay. Un avis que ne partage pas Mathieu Cisel, doctorant à l’ENS Cachan. « Les MOOC ne remplaceront pas les écoles : ils les pousseront dans leur retranchement et les obligeront à justifier leur valeur ajoutée », estime-t-il.
La France doit vite se positionner
Pour Mathieu Cisel, il est urgent que la France prenne part au débat qui agite actuellement la sphère de la formation. « L’école de management de Grenoble vient d’acheter, à la plateforme américaine Udacity, un MOOC animé par un professeur de l’Université de Stanford. Si la France ne se positionne pas davantage sur le marché, il y a un risque de colonisation par les universités et les entreprises américaines du système éducatif français », estime-t-il. Or, « l’Hexagone a toutes les clés pour être en bonne place dans l’univers des MOOC : la qualité de son enseignement, les compétences de ses acteurs, les budgets alloués à la formation… », surenchérit Jean-Noël Thiollier. Les relations, parfois tendues, qui unissent le monde de l’entreprise et celui de l’enseignement supérieur doivent, elles aussi, être repensées. « Le nouveau rôle de l’école est d’être un assembleur de modules de formations, non de maîtriser la chaine pédagogique de A à Z. Cette mission nécessite de construire des partenariats avec les entreprises et les organismes de formation », avance Jean Charroin, directeur d’Audencia Nantes. Pour Eric Matarasso, directeur associé de Quatre Vents, les MOOC doivent également trouver leur système de monétisation. « Aujourd’hui, les entreprises qui créent des cours en ligne se rémunèrent par le bénéfice d’image. Quand les MOOC seront matures, cette équation ne sera plus valable et il faudra trouver un modèle économique viable, donc non basé sur la gratuité. »
Aurélie Tachot