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L’emploi en Europe d’ici 2030 : le numérique au coeur de la transformation

Par Philippe Guerrier | Le

Dans son récent rapport The Future Of The European Job Market, Forrester estime que « la crise Covid-19 accélérera la transformation du marché de l’emploi en Europe ». Synthèse.

Etude Forrester : The Future Of The European Job Market - © D.R.
Etude Forrester : The Future Of The European Job Market - © D.R.

Dans cet exercice de prospective du marché de l’emploi en Europe à l’horizon 2030 basé sur des données multi-sources, le cabinet d’études Forrester nuance les approches par pays en fonction de plusieurs critères dont :

  • l’évolution démographique ;
  • la perspective de croissance ;
  • le degré de productivité ;
  • la disponibilité des compétences adéquates.

« Les gouvernements devront aussi s’engager en faveur d’une protection sociale à l’ère post-Covid-19 », ajoute Dan Bieler, Principal Analyst chez Forrester en charge de cette étude qui décortique les principales évolutions à moyen terme.

La crise Covid-19 accélérera les tendances RH actuelles

Selon Forrester, l’économie à l’ère numérique manque de souffle alors qu’une large gamme de technologies a un impact sur le paysage de l’emploi en Europe entre suppressions, créations et transformations de postes ; 

  • L’emploi dans le secteur high-tech et « l’économie de la connaissance » varie considérablement en fonction des pays européens. Le Danemark, la France et la Finlande contribuent le plus au segment des services faisant appel à la gestion intense des connaissances. L’implication des pays de l’Europe du Sud (Italie, Espagne, Grèce…) est beaucoup plus faible ;
  • Les nouvelles générations de personnes arrivant sur le marché du travail (« Millennials ») sont plus exigeants vis-à-vis de leurs employeurs en termes d’attractivité de l’environnement de travail, des méthodes de travail, de diversité, d’inclusion et de salaire. 

Vers une population active multi-générationnelle

  • L’évolution de la courbe démographique n’est pas favorable au marché du travail, en raison d’un vieillissement global de la population en Europe. Au niveau de l’UE, l’âge moyen de la population active est situé à 43,11 ans en 2018 et il augmente depuis plusieurs décennies. D’ici 2030, la population active en Europe perdra 13 millions de personnes (source : « The future of work in Europe » de McKinsey & Company de juin 2020, citée dans l’étude Forrester)  ;
  • Il faudra compter sur une population active multi-générationnelle qui aura besoin de se comprendre pour collaborer de manière efficace. Des solutions pour le travail des seniors devront être aménagées comme le temps partiel, des contributions par projets ou l’exploitation de compétences rétribuée en « extra-monnaie ».
  • L’Europe manquera de compétences nécessaires dans les sciences, les technologies, l’ingénierie et les mathématiques. Dans le segment des études TIC, la question du déséquilibre de la proportion hommes/femmes restera prégnante. Il y a trois fois plus d’étudiants que d’apprenantes dans ce secteur au niveau universitaire.

Le télétravail et des technologies marqueront en profondeur le marché de l’emploi 

  • Le nomadisme, favorisé par les outils numériques (vidéoconférence, solutions collaboratives…), aura une influence sur les méthodes traditionnelles de travail. Cette tendance sera accentuée par la propension des travailleurs à adopter un statut d’indépendant dans leur vie professionnelle. Forrester évalue à 5 millions le nombre de « nomades numériques » dans le monde, dont deux millions en Europe (hors freelancers).
  • Avec le télétravail, les employés dépendront de moins en moins de leurs bureaux physiques en entreprise. D’ici 2030, le télétravail sera la norme pour les cadres tandis que le travail sur site deviendra une exception. Au niveau de l’UE, la proportion de télétravailleurs progresse de 7,7 % en 2008 à 9,6 % en 2017 (source : Forrester’s Q2 2020 European Pandemic EX Survey).
  • Le développement de l’automatisation, associé aux progrès réalisés dans le domaine de l'IA, devrait affecter entre 15 et 50 % des emplois (source : « The future of work ? Work of the future ! » European Commission, May 3, 2019).
    Il faudra accompagner une montée en compétences numériques des employés pour qu’ils bénéficient des avantages à tirer de l’automatisation des processus et qu’ils se concentrent sur des tâches à plus forte valeur ajoutée.  

La régulation étatique s’adaptera au paysage du marché du travail 

  • Les travailleurs indépendants et freelancers bénéficieront d’une couverture sociale appropriée. Le nombre de travailleurs indépendants (à temps partiel ou à temps plein) est passé de 7,7 à 9,6 millions en Europe entre 2008 et 2015, avec une forte concentration en Europe de l’Ouest (Royaume-Uni, France et Pays-Bas en particulier).
  • Le niveau des rémunérations suscite également des débats en Europe, comme celui portant sur la création d’un revenu de base universel ou le salaire minimum. En l’état actuel, sur les 27 membres de l’UE, 21 disposent d’un système équivalent au SMIC en France avec de grandes variations sur les niveaux et critères d’attributions en fonction des pays.  

Marché du travail en Europe : les 6 recommandations de Forrester

• Déployer les technologies adéquates et y associer des chartes éthiques ;
• Fédérer et gérer un capital humain diversifié ;
• Protéger la vie privée de ses employés ;
• Favoriser la formation continue ;
• Promouvoir l’immigration légale en Europe pour pallier aux manques de ressources humaines ;
• Conserver l’accès du savoir engrangé par les employés senior.