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Université ANDRH « Se retrouver pour engager des réflexions sur les grandes transformations en cours »

Le | Bien-être au travail

En première ligne depuis le début de la crise sanitaire, la DRH « sera encore pour de longs mois en prise de position et en accompagnement des changements », estime Emmanuelle Germani, présidente du groupe ANDRH Provence qui accueillera l’Université de l’ANDRH les 7 et 8 octobre 2021 à Marseille dans le cadre de La Friche de la Belle de Mai sur le thème : « le travail change et si on changeait tout ? ».

Pour la DRH du groupe textile Kaporal : « les DRH ont besoin de se retrouver pour aborder un futur volatile, complexe et incertain » et l’Université de l’ANDRH leur permettra d’engager des réflexions sur les grandes transformations en cours, économiques, sociales ou encore écologiques.

Toutefois le lien entre les professionnels de la fonction RH n’avait pas été rompu, y compris pendant les périodes de confinement. Le groupe ANDRH Provence, par exemple, a rapidement créé un groupe Whatsapp dès le début de la crise, pour partager entre professionnels afin de prendre les bonnes décisions et de partager les pratiques « dans une situation inédite ».

Parmi les actualités du moment pour les DRH, selon Emmanuelle Germani :
• l’organisation du retour sur site ;
• l’engagement des collaborateurs «  car nous ne sortons pas indemnes d’une telle crise » ;
• la relation avec les collaborateurs un sujet que tous les DRH ont à l’esprit.

Emmanuelle Germani - © D.R.
Emmanuelle Germani - © D.R.

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Emmanuelle Germani, présidente de l’ANDRH Provence et DRH de Kaporal répond à RH Matin

L’ANDRH Provence co-organise l’université de l’ANDRH les 07 et 08/10, à Marseille. Comment vous préparez-vous à ces retrouvailles entre DRH de tout le territoire ?

Aborder un futur volatile, complexe et incertain

Cette université est un point fort pour entretenir la convivialité entre les DRH, qui se retrouvent souvent seuls dans l’exercice de leur fonction. Cet événement est particulièrement important compte tenu du contexte sanitaire : la fonction RH a été bousculée et se retrouve en première ligne. Cette période épuisante n’est pas terminée mais nous allons pouvoir nous retrouver les 07 et 08/10 à Marseille et aborder un futur volatile, complexe et incertain.

Ce contexte devra être accompagné, là encore, par les DRH. Le monde est en complète transformation du fait de la crise sanitaire et de ses impacts économiques et sociaux, mais aussi impacté par la transition écologique. Nous sommes une fonction qui sera, pendant encore de longs mois, en prise de position et en accompagnement du changement auprès de nos directions générales. Cette université de l’ANDRH permettra d’engager des réflexions sur ces sujets.

L’Université ANDRH 2021 - © DR.
L’Université ANDRH 2021 - © DR.

Comment vous êtes-vous organisés lors de la crise pour maintenir le lien entre vos pairs au sein de votre groupe local ANDRH Provence ?

Un partage d’informations très précieux

Maintenir le lien a été notre préoccupation première. Dans cette situation de crise, il était plus que jamais important de resserrer les liens. Dès le début de la crise, nous avons lancé un groupe de discussion sur WhatsApp qui a évolué aujourd’hui sur la plateforme Signal. Le succès a été foudroyant puisque une soixantaine de personnes se connectaient lors des moments les plus forts de la crise pour pouvoir prendre les bonnes décisions, partager des pratiques dans une situation totalement inédite. Ce partage d’informations a été très précieux notamment avec le nombre de lois et de décrets à suivre. Il nous a fait gagner beaucoup de temps et a permis de rompre la solitude de notre fonction. En parallèle, nous avons organisé des webinars une fois par mois, qui étaient des occasions d’échanger sur des thématiques diverses. Au sein de notre groupe, au-delà des fonctions traditionnelles RH (DRH/RRH, Direction de Relations sociales, etc…), nous disposons d’un écosystème d’adhérents comme des experts juridiques qui enrichit la vision et la compréhension de la fonction.

Malgré l’absence d’événements en présentiel, l’intérêt pour le groupe local ne s’est pas délité. De nombreux nouveaux adhérents nous ont rejoints car ils ont ressenti le besoin de soutien et d’accompagnement par un groupe de pairs. La crise a été révélatrice de l’importance d’un réseau professionnel, solide et bienveillant. Les DRH ont vécu des situations difficiles avec de la pression permanente et des situations humaines souvent complexes. Avoir un endroit où « poser ses valises » et souffler a été très utile.

Quelles sont les préoccupations des DRH pour cette rentrée ?

Plusieurs questions se posent :

  • La façon dont s’organisera le retour sur site ;
  • L’engagement des collaborateurs car, nous ne sortons pas indemnes d’une telle crise. La qualité de la relation avec nos collaborateurs est dans tous les esprits des DRH. La crise n’est pas que sanitaire, elle a bousculé les équilibres vie-privée, vie-professionnelle. Elle a remis la quête de sens en première position. Ce sujet était déjà en réflexion avant la crise, mais il est davantage au centre car le temps s’est arrêté en quelque sorte, permettant de travailler et réfléchir différemment. Dans de nombreux cas, il y aura un avant et après. Le retour dans l’entreprise en sera impacté.
  • Le dialogue social, car d’autres processus comme le recrutement, l’attraction et la rétention des talents peuvent être impactés.

Avez-vous anticipé ces sujets-là chez Kaporal et mis en place des plans d’action ?

Nous avons lancé nos plans d’action pendant la crise, en mode réactif, en trouvant des solutions d’un point de vue humain. Nous avons démarré un programme qui a pris le nom de « Care » par la suite, où il a été d’abord question de la sécurité des collaborateurs, par exemple lors de la réouverture de nos magasins ou en poursuivant l’activité au siège. Nous avons eu une politique volontariste pour être dans un bon niveau d’accompagnement mais aussi de soins et de prise en compte de la santé des collaborateurs et de celle de leur famille. Nous sommes une ETI d’environ 500 collaborateurs dont 140 au siège. Nous avons ouvert ainsi une ligne RH où les collaborateurs et managers ont pu nous interpeller directement. Nous avons multiplié les actions pour que les gens se sentent le plus sécure dans cette situation-là.

Télétravail : deux jours par semaine à compter de septembre 2021

Nous continuons dans ce sens avec le télétravail, qui au départ était subi. Et nous avons fait le choix d’un télétravail choisi à raison de deux jours par semaine à compter de septembre 2021. C’est une avancée importante qui répond à l’équilibre vie privée-vie professionnelle, à une meilleure qualité de travail et vise aussi à réduire notre empreinte carbone, car la RSE fait partie des enjeux stratégiques de Kaporal (nous avons réalisé notre bilan carbone Scope 3 en 2021). Aujourd’hui, l’une de mes priorités sera de réfléchir à des formations managériales autour du télétravail, aux missions et interactions à effectuer à distance et celles sur site.

Que pensez-vous justement de la loi Climat et résilience qui intégre la transition écologique parmi les attributions du CSE ?

Je ne suis pas surprise que cette thématique émerge et, chez Kaporal, nous saurons l’appréhender car la RSE est gérée par les RH. Il est évident qu’un sujet aussi majeur et qui bouscule autant la société dans son ensemble, aura une caisse de résonance dans l’entreprise et au niveau des individus qui la composent. Le rôle des DRH est de comprendre ces nouveaux enjeux et de s’en saisir. L’environnement avait déjà émergé avec la loi Pacte via la raison d’être de l’entreprise, un sujet plutôt traité par les DG. Mais la DRH a toute sa place dans la conduite du changement des équipes pour prendre en compte ces enjeux aux côtés de la direction générale. Nous travaillons d’ailleurs ainsi chez Kaporal. La vision transverse que je peux avoir des métiers, de l’organisation, notamment en tant que membre du Codir, me permet de travailler sur un plan de progrès avec mes collègues et les différents directeurs.

L’un des sujets abordés lors de l’université ANDRH à Marseille sera la communication dont celle en temps de crise. Comment gérez-vous l’obligation du passe sanitaire pour certains de vos magasins ?

En effet, nous avons un certain nombre de magasins qui se trouvent dans des centres commerciaux de plus de 20 000m2 et qui sont concernés par l’obligation du passe sanitaire. Il ne faut pas tomber dans la culpabilisation sur ce sujet. Le risque que les DRH peuvent avoir est d’instaurer un climat d’opposition entre les salariés vaccinés et non-vaccinés, de discrimination et de défiance. Il y a un risque de climat social dégradé si nous ne gérons pas avec finesse les messages. Il faut une communication positive et non stigmatisante.

DRH : garantir la légalité et la conformité

Des règles s’imposent à nous et nous les respecterons mais nous avons comme latitude la discussion qui est menée par les managers de proximité. Nous essayons de leur donner des clés.

Ensuite, quand vous êtes face à des positions dogmatiques et irréductibles, vous les subissez quoi qu’il arrive, en bout de chaîne. Nous nous devons d’appliquer la loi et nous l’appliquerons. Le rôle du DRH est d’être le garant de la légalité et de la conformité. Sans passe sanitaire, nous serons tenus de suspendre le contrat de travail et d’organiser un entretien au bout de trois jours.

Ces nouvelles obligations et responsabilités transférées à l’employeur par l’État sont lourdes, dans un contexte économique et social déjà compliqué…

Ne craignez-vous pas un sujet social ?

Nous travaillons en bonne coordination et intelligence avec nos représentants du personnel. Le climat social est assez serein.

Pensez-vous être confrontés d’ici quelques semaines à des suspensions de contrat de travail ?

Risque d’explosion d’arrêts maladie de complaisance…

Beaucoup de gens sont encore dans l’hésitation, c’est à nos managers d’effectuer un travail de pédagogie et d’accompagnement. Mais nous devons aussi respecter le choix de nos salariés tout en les rendant conscients des conséquences.

Nous aurons forcément des personnes qui refuseront le passe sanitaire. Mais au retour des congés, des lignes auront peut-être bougé en voyant l’évolution de l’épidémie en Outre-mer, les restrictions de la vie sociale pour les non vaccinés.

Nous aurons aussi des salariés avec des positions fermes et définitives sur le refus du vaccin et qui ne pourront pas effectuer des tests PCR sans arrêt. Et nous allons devoir gérer des suspensions de contrats voire des licenciements pour absences injustifiées ce fait-là. Sans compter le risque d’explosion d’arrêts maladie de complaisance…

Comment anticipez-vous  la gestion des effectifs dans les magasins en cas de suspension de contrat ?

C’est une nouvelle contrainte et pression sur les équipes RH, déjà confrontées à une pénurie de profils. Le recrutement sera clé, mais dans un cadre de contrats courts et précaires. Nous anticipons une rentrée difficile…

Lors du retour sur site, vous envisagiez d’arrêter d’exploiter l’outil Yammer, qui durant cette crise a prouvé l’intérêt du lien social dans la continuité d’activité. Où en êtes-vous ?

Avec Yammer, nous touchions l’environnement professionnel tout en pouvant parlant d’autre chose. Je suis toujours en réflexion sur l’intérêt du maintien de cet outil. Sur notre siège comme nous sommes 140 personnes, avec le retour sur site, nous pouvons avoir lien qui soit suffisant. Nous sommes en mode test and learn.

Quels seront vos autres chantiers sociaux ?

Un business model en forte évolution

Nous allons accompagner les équipes à travailler différemment. Notre business model est en forte évolution et cela changera notre organisation, les métiers, les compétences. Des missions vont évoluer, sous l’influence de la digitalisation ou de la RSE par exemple. Plus que jamais, la capacité à s’adapter, à apprendre et à se réinventer sera clé pour nos collaborateurs. À nous de les accompagner.

Et concernant votre groupe ANDRH Provence, quelle sera son actualité ?

Nous allons tout d’abord organiser nos retrouvailles avant un afterwork de rentrée ! Nous avons aussi un événement en septembre 2021 avec le Lab RH, autour de l’évolution de la marque employeur à la marque collaborateur, une véritable lame de fond qui rejoint l’importance du « Care » au travail. Nous allons aussi poursuivre nos deux clubs lancés en 2020 à titre expérimental : l’un sur le juridique et les actualités sociales et l’autre sur l’emploi, une réflexion sur la carrière et les parcours des RH. Et en 2022, nous lancerons un club sur la RSE, au vu des attentes sur le sujet.