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Séverine Loureiro, Le Lab RH : « Vers une vision plus prospective et d’accompagnement des DRH »

Par Philippe Guerrier | Le | Sirh saas

Séverine Loureiro, qui vient de prendre la fonction de directrice générale du Lab RH, détaille ses priorités pour valoriser l’association de promotion de l’innovation RH. Mais la situation se tend du côté des start-ups membres en raison de la conjoncture économique dégradée.

Interview Séverine Loureiro, DG Le Lab RH : quelles priorités après sa nomination ? - © D.R.
Interview Séverine Loureiro, DG Le Lab RH : quelles priorités après sa nomination ? - © D.R.

Comment se porte Le Lab RH alors que l’association de promotion de l’innovation RH s’apprête à célébrer ses 10 ans d’activité en 2025 ?

Elle vient de nommer une nouvelle directrice générale : Séverine Loureiro. Elle vient épauler Mathilde Le Coz, présidente du Lab RH depuis 2021 et DRH de Forvis Mazars.

Psychologue du travail et diplômée du MBA MCI (marketing digital et innovation), Séverine Loureiro dispose d’une expérience de 20 ans en RH en entreprise (notamment au sein du Groupe BPCE) et en tant que professionnelle indépendante.

Elle détaille ses projets pour Le Lab RH et évoque la tension actuelle vécue par les start-ups au regard de la conjoncture et l’impact de l’IA dans le développement des solutions HR Tech.

En qualité de nouvelle DG du Lab RH, sur quels sujets prioritaires allez-vous concentrer ?

Nous allons d’abord travailler sur la manière pour mieux structurer notre organisation et nos activités. Le Lab RH va bientôt fêter ses 10 ans et nous avons vécu un peu comme une start-up.

Nous pouvons être fiers d’avoir développé notre écosystème en développant notre notoriété auprès des DRH qui nous connaissent bien. Nous arrivons maintenant à une certaine maturité avec une phase de structuration des process à renforcer au sein de l’association.

Mon expérience RH dans des grands groupes comme BPCE va m’aider dans ce sens. Il ne s’agit pas de tout processer. J’aime bien être dans le faire et dans l’action mais nous devons nous re-challenger.

Actuellement, je rencontre beaucoup d’adhérents, start-ups et grands comptes, pour appréhender leurs besoins de voir comment améliorer les opérations menées et les services proposés.

L’objectif est vraiment de challenger la valeur ajoutée apportée par Le Lab RH et muscler notre offre.

La mission du Lab RH change-t-elle pour autant ?

  • Notre mission reste la promotion de l’innovation RH. Mais elle n’a plus le même visage par rapport à la création de l’association en 2015. A l’époque, notre vocation était de favoriser l’acculturation à l’innovation RH.
  • Désormais, les DRH ne sont plus novices en la matière. On voit d’ailleurs de plus en plus de directions de l’innovation dans les entreprises.
  • Il ne s’agit plus d’expliquer ce qu’est l’innovation RH. Nous devons intégrer une vision plus prospective et d’accompagnement des DRH, répondre aux enjeux des start-ups de notre écosystème et développer les synergies entre elles et les DRH.

Justement, comment approfondir ces liens avec ces grands groupes pour faciliter l’intégration des services proposés par les start-ups, au-delà de la phase des POC ?

A mon avis, les POC (proofs of concept) sont un passage incontournable, surtout lorsque les entreprises sont frileuses à l’idée d’établir des relations avec les start-ups. La principale difficulté que rencontrent les grands comptes est d’identifier la bonne solution RH alors que l’offre est pléthorique aujourd’hui.

Au sein du Lab RH, nous avons un projet de mapping des start-ups RH, en partenariat avec Bpifrance.

Au-delà de la visibilité des technologies RH, il faut davantage insister sur l’apport concret apporté au DRH. Les start-uppers, qui développent des solutions RH, ne sont pas forcément issues du monde RH. Le Lab RH peut renforcer leur stratégie d’accès au marché.

Ressentez-vous une progression nette de la sensibilité des DRH aux solutions technologiques ?

Une nouvelle génération de DRH plus friandes des nouvelles technologies apparaît mais la progression n’est pas linéaire.

Il existe une partie des DRH qui se montrent réfractaires ou qui ont toujours un peu de mal à s’y retrouver. Le fossé se creuse encore un peu plus avec l’essor de l’IA générative.

La nouvelle génération adopte rapidement ChatGPT qui arrive en entreprise. Mais le fossé d’adoption de services RH numériques semble se creuser un peu en fonction des profils RH. Pour valoriser les meilleurs cas d’usage et promouvoir ces nouveaux outils, nous sommes partenaires du Prix IA&RH de l’association Hub France IA.

La rentrée de septembre 2024 est marquée par une bascule dans l’écosystème des start-ups en France sur fond de conjoncture économique dégradée : leviers coupés de financement, priorité à la rentabilité…Les start-ups du Labo RH sont-elles préoccupées dans ce contexte morose ?

La situation actuelle provoque un certain attentisme de la part des entreprises qui ont tendance à repousser les projets d’innovation ou les partenariats avec des start-ups.

La situation se tend donc du côté des start-ups pour qui cette attente peut engendrer des difficultés financières. C’est une question de survie pour certaines petites start-ups.

On sait que les technologies font l’objet de cycles de développement. La HR Tech sait se montrer résiliente mais il ne faut pas que la situation actuelle dure trop longtemps.

Comment les start-up membres du Lab RH vivent-elles l’accélération technologique de l’IA avec l’essor de l’IA générative notamment ?

Les start-ups voient surtout les opportunités que l’IA représente. Du côté des entreprises, l’implémentation de projets d’IA nécessite des efforts de pédagogie auprès des managers et des salariés. Des peurs et des freins peuvent émerger.

La question se pose plutôt ainsi : les entreprises sont-elles en capacité de bien accompagner les projets en interne et d’aller encore plus loin dans leur proposition de valeur via l’IA ?

Les start-ups du Lab RH [320 membres] peuvent les aider dans ce sens mais elles doivent aussi monter en compétences pour suivre l’évolution de l’IA et éviter de se faire distancer.

Le Lab RH fait partie d’un collectif qui a récemment présenté un nouvel ouvrage dédié au Green RH*. Pour quelles raisons une DRH peut s’intéresser à ce sujet ?

Il y en a beaucoup mais il en existe une qui répond à leurs enjeux à court terme : l’attractivité.

  • Aujourd’hui, les entreprises peuvent avoir des difficultés à recruter. Pour attirer des candidats, notamment les plus jeunes diplômés, il faut arriver à aligner les valeurs de l’entreprise avec celles que recherchent les nouvelles générations : développement durable, conscience écologique, responsabilité sociétale, etc.
  • Si les entreprises n’adoptent pas des pratiques plus vertes, elles vont perdre l’intérêt des talents.
  • En interne, c’est intéressant aussi de voir comment on peut donner les moyens aux salariés pour qu’ils deviennent actifs sur ces sujets, au-delà des engagements descendants de l’entreprise et des RH.

* Green RH - Quand la fonction RH fait sa révolution vert par Michel Barabel, Olivier Meier, et Antoine Poincaré (Editions Dunod, septembre 2024)

L’expérience collaborateur : thème principal du prochain livre de Séverine Loureiro

Passionnée pour les évolutions de la fonction RH et du travail, Séverine Loureiro est conférencière et autrice de plusieurs livres sur les nouveaux enjeux RH. Son prochain ouvrage portera sur l’expérience collaborateur. Un sujet qu’elle suit depuis longtemps.
« • Ce sera une boîte à outils de l’expérience collaborateur. L’ouvrage paraîtra aux Editions Dunod d’ici la fin du 1ᵉʳ trimestre 2025.
• J’ai écrit le premier livre en France sur ce thème en 2018. Beaucoup de choses ont bougé à ce sujet comme l’hybridation du travail, notamment en lien avec la crise Covid-19. D’autres n’ont guère évolué comme l’importance de l’offboarding », indique Séverine Loureiro.

Concepts clés et définitions : #DRH ou directeur des ressources humaines