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Stratégies RH : comment les leaders s’adaptent à la crise ?

Le | Motivation & engagement

Comment dépasser la sidération liée au Covid-19 en termes de gestion des ressources humaines ? Des représentants de Natixis, Paragon ID et Voyages SNCF témoignent das le cadre d’une table ronde organisée par LHH, Dialogues et Actance.

RH et Covid : comment s’adaptent les leaders ? - © D.R.
RH et Covid : comment s’adaptent les leaders ? - © D.R.

« Leaders en temps de crise : les premières décisions, ce qui fait la différence, comment préparer l’après ? » C’est sur ce thème que cinq personnalité issues de divers horizons (RH, mobilité, finance, technologie…) sont intervenues dans le cadre d’une table ronde organisée à distance dans le cadre des “Conversations digitales” organisée le 21 avril par LHH, en partenariat avec Dialogues et le cabinet d’avocats Actance.

Anne Lebel, Natixis : « Maintenir le contact et organiser le management à distance »

« 97 % de nos collaborateurs travaillant à domicile. Nous avions veillé à les équiper préalablement et cela nous a été bien utile. Nous avons aussi outillé les leaders et le Comex pour maintenir le contact et organiser le management à distance. Nous avons mis en place des formations et des posts sur les réseaux internes pour expliquer comment animer les réunions à distance, maintenir un équilibre des temps. Et depuis trois semaines, nous avons mis en place, à destination des managers, un sondage régulier de 5 questions via une plateforme afin de sonder sur le moral de leur équipe », indique Anne Lebel, DRH de Natixis (banque de financement, de gestion et de services financiers, propriété du groupe BPCE).

« Nos managers avaient été formés au management à distance lors d’un nos chantiers de transformation en 2017 : nous les avions équipés d’outils modernes, initiés au travail collaboratif, à distance, et permettant du partage… Donner du temps à leur équipe et de l’attention n’était pas au cœur de leurs préoccupations et maintenant, ça l’est devenu. Ils s’y sont mis de façon naturelle depuis qu’ils sont dans des conditions plus difficiles. »

« Nous travaillons sur des scénarios de déconfinement dans un contexte de baisse d’activité où il faut construire et proposer solutions qui permettent de maîtriser les coûts, de préserver l’emploi et de donner de la perspective aux collaborateurs en s’appuyant sur de la formation upskilling et reskilling. »

« Le dialogue social est absolument nécessaire aujourd’hui. Cela a été compliqué au début de la crise car nos partenaires sociaux nous ont lancé un grand cri existentiel car nous avions dû prendre des décisions dans l’urgence au cours des premiers jours. »

« Nous avons mis en place, en 2017, notre instance de dialogue stratégique et de transformation. C’est une instance informelle qui se compose de deux représentants par organisation syndicale. Elle est convoquée, soit à leur demande, soit à la nôtre sur des sujets d’actualité ou sur d’autres thèmes….C’est un lieu qu’on utilise pour donner un temps d’avance à nos partenaires sociaux et échanger de manière plus directe avec eux sur un certain nombre de grands projets. »

« Depuis le début de la crise, nous nous appuyons sur cette instance en réunissant les partenaires sociaux toutes les semaines. Nous n’avons pas encore atteint un état de co-construction mais nous les amenons progressivement à avoir une approche pragmatique en trouvant des solutions. Cela reste fragile mais nous progressons. »

« Leaders en temps de crise : les premières décisions, ce qui fait la différence, comment préparer l’après ?”  - © D.R.
« Leaders en temps de crise : les premières décisions, ce qui fait la différence, comment préparer l’après ?” - © D.R.

Jean Zuccarelli, LHH : « Cette crise est un révélateur et un formidable stress test »

« Passé le moment de sidération, le premier niveau de recul est de se projeter à partir du 11 mai. Au niveau individuel, nous avons des retours de journées exténuantes avec des charges mentales énormes », déclare Jean Zuccarelli, directeur de la Practice Leadership, Assessment & Coaching chez LHH (groupe de conseil en ressources humaines, propriété du groupe Adecco).

« La fatigue apparaît chez les leaders qui ont été poussés dans leurs retranchements. Et la demande de fond est le besoin de se centrer et de prendre du recul pour bien gérer l’énergie et son temps. On parle de résilience et d’aller chercher ses ressources personnelles dans le temps. »

L’urgence aussi est de préparer l’après-crise avec un corps social qui reviendra avec des attentes.

« Le deuxième axe c’est de trouver un équilibre entre la distance et la présence. Au niveau de l’entreprise, le questionnement, c’est son projet collectif et son futur. Cette crise est un révélateur et un formidable stress test effectivement. L’urgence aussi est de préparer l’après-crise avec un corps social qui reviendra avec des attentes. Il faut aussi s’interroger sur l’utilité sociale. Il faudra se poser la question de ce qu’il faudra garder en héritage de ces semaines d’apprentissage. Aujourd’hui, il y a une demande irréfléchie d’un leadership authentique. »

Jean-Dominique Simonpoli (Dialogues) : « Mobiliser l’ensemble du corps social »

« La différence se fera sur la qualité du dialogue social. Il faut donner un sens dans le leadership et ensuite mobiliser l’ensemble du corps social. Les OS doivent être aussi parties prenantes des propositions. La qualité du leadership se remarque dans la capacité à embarquer tout le monde avec soi », déclare Jean-Dominique Simonpoli, directeur général de l’association Dialogues, présenté comme un lieu d’échanges entre syndicalistes, chefs d’entreprise et les spécialistes des questions sociales.

(Clem Garvey, Paragon ID)« Nous avons réussi à engager l’ensemble du personnel »

« Par rapport au Royaume Uni, aux États-Unis et à la Roumanie, le gouvernement français a très vite compris la dimension du problème et il s’est octroyé des moyens pour y faire face. Le désir d’équilibrer à la fois l’indemnisation via l’activité partielle, de protéger les entreprises, et de lutter contre le coronavirus sans vouloir fermer l’ensemble de l’outil industriel, a un vrai sens », déclare Clem Garvey, CEO de Paragon ID, fournisseur de solutions d’identification numérique.

« Nous sommes engagés dans les activités qui sont au cœur de l’actualité de l’économie. Nous avons réussi à engager l’ensemble du personnel dans ce combat. La relation entre les employés, l’entreprise et les clients est devenue intime dans ce contexte. Il est beaucoup plus facile de conserver les usines en faible activité pour la reprise plutôt que de les fermer. »

Alain Krakovitch (Voyages SNCF) : « Je suis devenu le directeur de la démobilité assumée »

« Pour se tourner vers l’avenir, il faut savoir donner et partager du sens. Nous sommes confrontés à la question de la ‘démobilité’ . Le 11 mai avec le début du déconfinement, quelles seront les habitudes de mobilité des Français ? », évoque Alain Krakovitch, directeur général de Voyages SNCF.

« Nous devons entrer dans une logique de co-construction. Le télétravail perdurera et modifiera les habitudes des Français. On se réjouit tous des progrès du télétravail mais cela pose un problème pour notre chiffre d’affaires quand on est une entreprise de mobilité ».

« Nous sommes confrontés à un énorme plan d’économie à mettre en place. Il faudra gérer à la fois un plan d’économie et de reprise. Cette combinaison compliquée et contradictoire est un excellent test pour détecter les potentiels à faire monter dans notre organisation. »

« L’enjeu est de redonner confiance pour que les gens reviennent dans les TGV. On sait organiser un TGV pour qu’une place sur deux soit occupée mais nous serons à 50 % de taux de remplissage. Et pour être rentable un TGV doit avoir 75 à 80 % de taux de remplissage. On doit arriver à rassurer et trouver des solutions alternatives à la distance physique d’un mètre. »

« Ce que nous vivons est assez unique depuis la seconde guerre mondiale. Je suis devenu le directeur de la démobilité assumée. Nous faisons rouler aujourd’hui 7 % des trains. C’est un record extrêmement négatif. »

« On ne pourra pas convaincre nos clients de revenir dans nos trains si on n’a pas convaincu nos agents et OS. Derrière le leadership, il y a la notion de surface de contact. Nous avons besoin d’avoir des contacts à tous les niveaux pour partager le sens. »

« Cette crise a révélé un autre type de dialogue social. Nous avons tous subi et été informés avec le même niveau de connaissance au même moment. Nous avons été dans une logique de transparence et de co-construction qu’on n’avait pas connues auparavant notamment en matière du port de masques, du chômage partiel, l’adaptation de nouveaux gestes métiers de nos opérateurs. »

(Synthèse réalisée en partenariat avec News Tank RH)

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