Rapprochement Swile - Bimpli : « Nous gérons 3 milliards de titres d’avantages salariés »
Par Philippe Guerrier | Le | Bien-être au travail
Swile a bouclé le rachat de son concurrent Bimpli, filiale du Groupe BPCE. Le groupe bancaire devient le 1er actionnaire du nouvel ensemble. Entretien croisé avec Loïc Soubeyrand (CEO de Swile) et Pierre-Antoine Vacheron (DG Paiements Groupe BPCE).
Swile a finalisé fin 2022 le rachat de son concurrent Bimpli, filiale de Groupe BPCE. L’annonce initiale remontait à juillet 2022.
Le groupe bancaire devient le premier actionnaire de Swile avec 22 % du capital acquis.
Le nouvel ensemble a vocation à proposer une offre « intégrée » d’avantages salariés dématérialisés. Le rapprochement permet :
- de disposer d’une base de 75 000 entreprises avec des clients comme Carrefour, JCDecaux, Spotify, FNAC-Darty, Etam, TikTok et Monoprix ;
- de dénombrer 5 millions de salariés utilisateurs ;
- de générer un revenu annuel récurrent (Annual Recurring Revenue ou ARR en anglais) de 140 millions d’euros en 2022 ;
- d’atteindre une valorisation lui permettant de revendiquer le statut de « centaure » (start-up dont l’ARR est supérieur à 100 millions d’euros) ;
- d’atteindre la barre de 1000 employés entre la France et le Brésil.
Le duo Swile - Bimpli vise la profitabilité en 2023 sur le marché français et au niveau du groupe en 2004.
Entretien croisé avec Loïc Soubeyrand, CEO et fondateur de Swile, et Pierre-Antoine Vacheron, directeur général Paiements Groupe BPCE, sur les contours des nouvelles ambitions et les prochaines étapes opérationnelles.
Après le closing, quelles sont les prochaines étapes du développement du nouvel ensemble Swile - Bimpli ?
Loïc Soubeyrand : C’est un deal inédit qui scelle une alliance entre une licorne (Swile) et un capitaine de l’industrie bancaire (Groupe BPCE) pour donner vie à une ambition commune à l’échelle internationale. Il a fallu beaucoup d’audace et de confiance.
Nous donnons naissance à un leader dans le domaine de la Worktech :
- 1000 employés,
- 5 millions d’utilisateurs,
- 75 000 entreprises clientes.
Sur le marché des titres restaurant, une proportion de 40 % du marché a basculé dans la dématérialisation. Nous avons donc encore beaucoup de croissance à chercher en France.
Notre part de marché se situe aux alentours de 35 % sur le segment des titres restaurant qui est le principal avantage salarié. Nous sommes le deuxième acteur en France derrière le groupe Edenred mais cela se joue dans un mouchoir de poche. Nous comptons décrocher le leadership du marché en 2023.
Depuis début janvier 2023, Bimpli et Swile s’inscrivent dans une logique de diagnostic et de co-construction. L’enjeu de marque est important. Nous opérerons sous une même organisation et une seule bannière dans les meilleurs délais. C’est le sens de l’histoire.
Pierre-Antoine Vacheron : Fin 2021, le Groupe BPCE a regroupé la gamme de services d’avantages salariés dans l’offre Bimpli. Avec la maturité, la qualité de management et la capacité d’investir acquise par Swile, nous avons perçu une opportunité d’aller plus loin, plus haut et plus vite. La force de frappe est désormais beaucoup plus importante.
Du côté de Groupe BPCE, nous avons investi ce marché avec Natixis Intertitres, émetteur de Chèque de table depuis 1982 et créateur de l’offre de titre-restaurant dématérialisé Apetiz en 2014. Nous étions considérés comme le trublion des 4 principaux acteurs à l’époque (face à Groupe UP, Edenred et Sodexo).
Offre rationalisée sous la bannière Bimpli
En décembre 2021, Natixis Payments (filiale du Groupe BPCE) a fait émerger l’offre Bimpli en combinant plusieurs solutions qu’elle détenait dans son portefeuille “produits” :
• Apetiz,
• Le Pot Commun,
• CADO,
• Comitéo.
Sur l’ensemble des activités de Groupe BPCE, les avantages salariés demeurent un petit segment par rapport aux services bancaires. Mais ils représentent deux intérêts :
- les avantages salariés ont besoin de technologies de paiement qui constituent un point fort du Groupe BPCE,
- la dimension relationnelle des entreprises clientes alimentées par Natixis et nos réseaux Banques Populaires et Caisses d’Epargne.
Avec ce rapprochement, quel volume de titres d’avantages salariés gérez-vous et à quelle extension peut-on s’attendre ?
En 2023, nous allons mettre l’accent sur le voyage d’affaires.
Loïc Soubeyrand : Entre Bimpli et Swile, nous gérons un volume de 3 milliards de titres, tous avantages confondus. Compte tenu de la complémentarité des offres, des synergies en termes de cross-sales sont attendues courant 2023 entre les 2 réseaux commerciaux.
- Par exemple, Bimpli exploite le titre CESU préfinancé pour les services à la personne à domicile que nous n’avions pas. Dans le sens inverse, Swile exploite le forfait mobilités durables absent de l’offre Bimpli.
- Il y aussi des ponts à ériger sur la partie des CSE. Avec la solution Comitéo by Bimpli, le Groupe BPCE a pris une part assez importante sur ce marché. Chez Swile, cela reste encore un segment naissant que nous avons commencé à explorer mi-2020.
En 2023, nous allons mettre l’accent sur le voyage d’affaires après l’acquisition d’Okarito en mai 2022. Ce produit business travel nous donne entière satisfaction. Nous sommes sortis de la phase bêta et nous allons désormais vendre le produit à plus grande échelle sous la marque Swile. Cette pépite ne demande qu’à être mise sur orbite. Elle constitue la première pierre de notre édifice Worktech pour dépasser le monde des avantages salariés stricto sensu.
Comment comptez-vous élargir votre base de clients ?
Pôle emploi devient le premier client du nouvel ensemble.
Pierre-Antoine Vacheron : Bimpli a la particularité de disposer d’une franchise très forte sur le secteur public avec des clients comme Pôle emploi qui devient le premier client du nouvel ensemble en termes de nombre d’utilisateurs, mais aussi le ministère de l’Economie et des Finances et des collectivités territoriales.
Nous disposons aussi de canaux de distribution forts, compte tenu de la couverture grands comptes de Natixis et de celle des PME à travers les réseaux bancaires Banques Populaires et Caisses d’Epargne.
Le contexte inflationniste semble favorable pour développer les avantages salariés dans les PME mais il faut lever les freins relatifs aux coûts inhérents d’adoption.
Loïc Soubeyrand : Avec la Covid-19 et l’essor du télétravail, la dynamique de marché des titres restaurant est bonne avec une progression de 12 % en 2021. C’est colossal pour un marché historique.
Le contexte demeure favorable avec l’inflation avec des entreprises qui cherchent à donner du pouvoir d’achat aux salariés sans trop augmenter directement les salaires. Pour 2022, nous nous attendons encore à une croissance du marché à deux chiffres.
Avec l’appui de Bimpli, la complémentarité des offres bat son plein sur le segment TPE-PME. Swile a pris initialement position dessus. Progressivement, nous avons monté l’échelle pour aboutir à des deals iconiques comme celui de Groupe Carrefour avec 70 000 employés décroché fin 2020.
Dans notre base clients,
- 35 % sont des grands comptes,
- 35 % sont des ETI,
- 15 % de notre clientèle provient du secteur public,
- le reste concerne les TPE.
Cette variété des profils représentent une force.
Comment comptez-vous avancer ensemble au niveau international ?
Loïc Soubeyrand : Nous nous concentrons sur l’axe franco-brésilien à court terme mais notre ambition dans la Worktech reste mondiale. Nous restons ouverts à d’autres opportunités de croissance externe pour y parvenir.
- Tout d’abord, nous allons consolider notre position en France. Nos fondations et notre rentabilité doivent être robustes ;
- Nous observons aussi une forte traction au Brésil, qui constitue le premier marché investi par Swile à l’international dès 2021. C’est le marché numéro un des avantages salariés dans le monde. Nous avons bien semé et nous avons récolté 85 000 nouveaux utilisateurs uniquement sur le mois de décembre 2022 ;
- Le plan de route de l’expansion internationale reste à clarifier. Nous avons envie à la fois d’avancer sur les marchés où les avantages salariés sont très importants et d’explorer de nouveaux marchés où les avantages salariés sont absents mais disposant d’un potentiel.
Comment l’ensemble Bimpli-Swile compte se distinguer de l’effervescence start-up, qui se poursuit autour des avantages salariés ?
Faire du 100 % digital, c’est trop tôt.
Loïc Soubeyrand : La principale question à se poser est de savoir dans les prochaines années qui va capter le marché des titres restaurant qui restent à dématérialiser.
A notre avis, faire du 100 % digital, c’est trop tôt. D’où la décision de Swile de développer une carte Swile puissante. Nous allons continuer les investissements dessus en termes de personnalisation, de services, de fonctionnalités plus sociales et plus responsables pour les utilisateurs.
Pour ceux qui veulent aller plus loin, nous lançons une carte 100 % virtuelle avec du paiement digital. Nous avons une offre qui permet d’avoir une carte virtuelle à la place d’une carte physique. Les fonctionnalités sont identiques mais tout se passe dans l’application Swile.