Recherche de travail : les contrôles de Pôle emploi vont s’intensifier en mode réponse graduée
Par Philippe Guerrier | Le | Motivation & engagement
Le gouvernement veut « intensifier » les contrôles sur les demandeurs d’emploi inscrites à Pôle emploi pour vérifier la démarche active de recherche d’activité professionnelle.
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Lors de son allocution télévisée le 9 novembre, le Président de la République Emmanuel Macron s’est montré ferme à propos de l’application d’un changement de calcul des droits à l’allocation chômage :
« A partir du 1er décembre 2021, une nouvelle étape va s’engager : il faudra avoir travaillé au moins 6 mois dans les deux dernières années pour pouvoir être indemnisé, alors qu’aujourd’hui les droits au chômage sont ouverts au bout de quatre mois de travail. Les demandeurs d’emplois qui ne démontreront pas une recherche active verront leurs allocations suspendues », a-t-il déclaré, en faisant le point sur d’autres sujets comme la vaccination et la retraite.
Le sujet a été amplifié par le gouvernement à la suite de cette intervention présidentielle.
Recherche d’emploi : une augmentation de 25 % des contrôles
Dès le lendemain de l’intervention télévisée du Président de la République, Élisabeth Borne, ministre du Travail, de l’Emploi et de l’Insertion, a pris le relais sur RTL.
« Nous allons intensifier les contrôles et c’est bien normal […] qu’on s’assure que les demandeurs d’emploi cherchent effectivement un travail, alors qu’on les accompagne comme on ne l’a jamais fait et qu’on a proposé des formations », déclare-t-elle.
« Les conseillers de Pôle emploi, dont c’est le rôle, vont vérifier qu’un demandeur d’emploi, pour lequel on a levé tous les freins pour sa recherche d’emploi, répond à des offres d’emploi et se rend à des entretiens d’embauche, qu’il peut participer aussi à des sessions de recrutements ou qu’il suit les formations qui lui ont été proposées. »
« Pôle emploi fait déjà des contrôles, mais ils vont s’intensifier :
- en 2019, Pôle emploi a fait de l’ordre de 400 000 contrôles,
- dans les six prochains mois, ils vont faire 250 000 contrôles, soit une augmentation de 25 % (sur six mois), et plus spécifiquement sur les secteurs en tension dans lesquels des entreprises n’arrivent pas à recruter. »
La personne intéressée au final sera mise dans la boucle, assure Élisabeth Borne : « C’est le demandeur d’emploi qui définit avec son conseiller, le type d’offre d’emploi auquel il doit répondre et s’il a précisé qu’il recherche une offre dans les 20 kilomètres, il n’y aura pas de problème s’il refuse une offre à 50 kilomètres. On évalue les choses de façon raisonnable. »
« Il s’agira d’une réponse graduée », précise la ministre du Travail. « La première fois, on va vous supprimer temporairement votre allocation, pendant par exemple un mois, puis si ça recommence, ça pourra être une suspension de deux mois, et ça pourra aller jusqu’à la radiation […] C’est une évaluation sur plusieurs mois et ce n’est pas un couperet. »
Chômage et emploi : « le paradoxe »
L’hypothèse d’une nécessaire revalorisation des salaires pour les offres d’emploi non pourvues a été évoquée avec Élisabeth Borne : « Il y a un travail qui se fait avec les branches, par exemple celles dont les minima de branche sont inférieurs au Smic et les branches qui ont des efforts à faire sur l’attractivité », déclare la ministre.
« Nous nous assurons aussi que l’on a des viviers de demandeurs d’emploi qui sont formés et qui ont déjà travaillé dans ces métiers et nous pouvons leur proposer des formations complémentaires, lorsque c’est nécessaire. Nous allons également booster toutes les propositions de mise en situation en entreprise. »
« Il y a un paradoxe auquel je ne peux me résoudre : on a à la fois beaucoup d’entreprises qui cherchent à recruter et qui n’y parviennent pas et un nombre encore élevé de demandeurs d’emploi. »
Pour la ministre, « Il y a aussi beaucoup d’entreprises qui cherchent à recruter, qui adaptent aussi leurs offres pour les rendre attractives, parfois en retravaillant l’organisation du travail pour éviter d’avoir des coupures. »
« L’objectif est de répondre au besoin des entreprises pour que ce manque de salariés ne vienne pas brider la reprise économique. Et dans le même temps, on s’assure qu’un maximum de demandeurs d’emploi retrouve un travail. »
« Non à la logique coercitive »
Parallèlement, sur FranceInfo, Gabriel Attal, porte-parole du gouvernement, précisait le dispositif de contrôle.
« Sur 100 contrôles réalisés aujourd’hui, il y a en moyenne 14 personnes à qui les agents envoient un message, un avertissement, ou à qui on est amené à suspendre les allocations un certain temps, de un à quatre mois, jusqu’à ce qu’elles témoignent d’une recherche active d’emploi. »
Au nom de CGT Pôle emploi, Guillaume Bourdic prend du recul avec ce renforcement des contrôles évoqués par le gouvernement. « Ce n’est pas la logique coercitive et répressive qui doit être à l’œuvre. »
Considérant qu’il faudrait davantage de moyens « pour mieux accompagner les demandeurs d’emploi, quitte à ce que les moyens aux contrôles de la recherche d’emploi soient réorientés vers l’accompagnement des usagers. »
Pôle emploi : les modalités actuelles du contrôle
- Un conseiller Pôle emploi et un demandeur d’emploi un chômeur doivent d’abord établir ce qu’on appelle une « offre raisonnable d’emploi » en fonction des compétences, du domicile et du salaire.
- Après deux refus, le demandeur d’emploi risque une sanction avec, à la clé, un mois de radiation au minimum.
- Un contrôle est réalisé par le conseiller et, si besoin, un deuxième est enclenché par un agent spécialisé.
600 collaborateurs à Pôle emploi sont en mesure de vérifier si le chômeur répond à des offres et s’il se rend à des entretiens.
« Nous ferons donc évoluer la procédure de contrôle, nous la simplifierons pour la faire gagner en efficacité à effectifs constants », indique la direction de Pôle emploi .
L’organisme public dispose d’un effectif globale de 54 478 collaborateurs sur le territoire national (chiffres 2020). Selon un un amendement au budget 2022 déposé aujourd’hui (12 novembre 2021), le gouvernement prévoit 600 recrutements au sein de Pôle Emploi en 2022, en particulier pour gérer le nouveau Contrat d’engagement jeune.
(article réalisé avec l’appui de notre partenaire média News Tank RH)