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Clarisse Pamies, Omind : « Nous créons pour les DRH des programmes innovants de formation ou de coach »

Par Philippe Guerrier | Le | Motivation & engagement

Unleash World Paris 2024 : la start-up française Omind, qui explore les neurosciences et les sciences du comportement, intègre les progrès de l’IA pour affiner l’évaluation des soft skills et certaines étapes du coaching. Les éclairages de la CEO Clarisse Pamies.

Clarisse Pamies, CEO Omind : neurosciences, sciences du comportement, et IA  au service des DRH - © P.G. pour NTRH
Clarisse Pamies, CEO Omind : neurosciences, sciences du comportement, et IA au service des DRH - © P.G. pour NTRH

Dans quelle mesure la gamme d’offres et de services d’Omind a évolué avec les nouvelles vagues de l’IA ?

L’essor de l’IA a profondément transformé notre gamme de services, nous permettant d’offrir des solutions encore plus personnalisées et efficaces.

Nous avons simplifié et optimisé nos outils d’auto-évaluation et de coaching pour mieux répondre aux besoins de développement des compétences comportementales (soft skills).

Grâce à l’IA, nous pouvons désormais proposer des analyses plus fines et objectives pour développer l’adaptabilité, les relations interpersonnelles et l’intelligence émotionnelle.

Si notre cœur de cible reste les managers, nous avons élargi nos solutions aux professionnels de la vente et aux leaders féminins, répondant ainsi aux besoins variés du marché.

Sur le volet individuel, nos programmes sont désormais 100 % en ligne pour faciliter une mise à l’échelle rapide. Ils s’appuient sur des tests gamifiés, traduits de plus de 40 000 publications scientifiques, pour évaluer les compétences, et incluent des modules de e-learning et du coaching personnalisé pour accélérer le développement.

Les résultats parlent d’eux-mêmes : nos programmes permettent une amélioration de +35 % des compétences comportementales clés, comme l’écoute et la capacité à fédérer les équipes.

Côté collectif, nous avons repensé notre module de réalité virtuelle pour des bootcamps immersifs, intégrant des jeux collaboratifs, des cas pratiques entre pairs et des insights scientifiques. Ces expériences renforcent la cohésion d’équipe tout en stimulant la performance opérationnelle.

Comment évolue ce référentiel de compétences comportementales avec les progrès de l’IA ? Cela modifie-t-il votre approche technologique ?

Les progrès de l’IA, notamment dans sa capacité à traiter et transformer de grandes quantités de données, ont permis d’enrichir notre référentiel de compétences comportementales.

Depuis la création d’Omind il y a 8 ans, nous intégrons ces avancées pour affiner l’évaluation des soft skills et proposer des recommandations plus précises et personnalisées.

Notre référentiel évolue en prenant en compte des compétences clés comme l’esprit critique, la flexibilité, et la capacité à interagir avec des technologies complexes, notamment l’IA.

L’apparition de l’IA générative, avec ses capacités conversationnelles, a aussi fait évoluer notre approche. Avec Mistral AI, nous expérimentons actuellement un agent conversationnel (chatbot) capable de fournir des recommandations de développement sur mesure. Il est mis en production courant novembre 2024, et nous permet d’exploiter l’IA pour des évaluations plus dynamiques et interactives.

Mais, dans le domaine RH, je ne crois pas au « tout coaching IA ».

Si l’IA peut accélérer certaines étapes du coaching, l’intervention d’un coach reste essentielle pour garantir un accompagnement approfondi. Notre force réside dans cette complémentarité entre technologie et accompagnement humain.

Comment expliquez-vous votre démarche d’innovation à un DRH pas forcément féru de nouvelles technologies ?

Clarisse Pamies, Omind, sur le stand Unleash Paris 2024  - © D.R.
Clarisse Pamies, Omind, sur le stand Unleash Paris 2024 - © D.R.

Nous adressons un marché déjà bien établi : le développement des talents et des managers. Traditionnellement, un DRH fait appel à des prestataires pour créer des programmes de formation ou de coaching.

Chez Omind, nous répondons exactement à ce besoin, mais en y ajoutant plus d’innovation et d’expériences : des données objectives et des technologies immersives pour optimiser les décisions et mesurer l’impact des programmes.

Concrètement, nous utilisons des outils basés sur les neurosciences, l’IA et la gamification pour cartographier les compétences des collaborateurs de manière fiable et précise afin d’établir un plan de développement personnalisé. Nos solutions ne se limitent donc pas à une simple auto-évaluation, comme avec des outils traditionnels tels que Hogan ou DISC.

Grâce à cette technologie, les DRH peuvent suivre les progrès des talents, adapter les programmes en fonction des besoins spécifiques, et obtenir des scores prédictifs qui anticipent la réussite des collaborateurs dans leur développement.

Alors pourquoi se contenter de moins quand la science et la technologie permettent aujourd’hui des approches RH beaucoup plus précises ? Nous travaillons déjà en partenariat avec des entreprises du CAC 40 et des sociétés américaines, notamment dans les secteurs du logiciel, de la banque et du retail.

Nous avons aussi certifié une centaine de coachs, y compris des coachs internes dans de grandes entreprises, pour garantir un accompagnement en profondeur.

Dans l’écosystème HR Tech en France, la start-up Goshaba, qui disposait d’un profil similaire au vôtre (jeux vidéo, data et neurosciences pour les RH), est récemment tombée en liquidation judiciaire. Comment expliquez-vous cette défaillance ?

À mon avis, la clé réside dans le bon timing et la manière d’adopter cette vague technologique.

Nous partageons des points communs avec Goshaba, notamment l’utilisation des jeux vidéo et des sciences cognitives dans le domaine RH. Mais chez Omind, nous avons choisi de nous positionner sur le développement des talents et des managers, convaincus que c’est l’avantage compétitif dans lequel les entreprises doivent investir à long terme pour leurs transitions.

Et nous pensons que pour le coaching et la formation sur l’intelligence émotionnelle, les neurosciences apportent un gros plus : aider chacune et chacun à mieux prendre en main ses potentiels en connaissant mieux ses modes de fonctionnement.

Omind s’est aussi différencié en investissant massivement dans deux domaines clés :

  • l’IA prédictive qui permet de personnaliser les parcours de développement en fonction des besoins spécifiques de chaque talent,
  • l’accompagnement par des coachs experts formés et certifiés à nos outils.

Nous fournissons des recommandations sur-mesure, basées sur des données objectives et fiables, garantissant ainsi une approche plus complète et personnalisée du développement des talents, et une optimisation des budgets.

Sur le volet R&D, Omind se concentre sur la gestion des données sous un angle data intelligence.

Que pensez-vous des discussions budgétaires au Parlement sur le Crédit Impôt Recherche (CIR) susceptible d’être raboté ?

C’est préoccupant si l’on coupe les investissements technologiques sur le long terme. Nous nous appuyons sur ces types de dispositif de soutien financier à l’innovation (CIR/CII pour Crédit d’Impôt Innovation). Et nous aimerions bien avoir de la visibilité sur 2025 qui arrive vite.

La situation d’incertitude pourrait nous impacter rapidement alors que nous devons rembourser le PGE, comme de nombreux acteurs innovants sur le marché. Nous risquons de subir un effet ciseau dans la technologie.

Les DeepTech, dans lesquelles Omind évolue, nécessitent des investissements lourds pour soutenir des projets sur le long terme. D’autres pays comme la Chine et les États-Unis l’ont bien compris, et cela nous motive à continuer de défendre ces enjeux stratégiques pour l’avenir technologique du marché européen.

Avez-vous davantage de visibilité dans le soutien financier à la R&D au niveau de l’UE ?

Nous avons, par le passé, bénéficié de projets de recherche avec des partenaires européens mais les dispositifs actuels sont longs et coûteux, notamment en termes de consulting, pour soumettre un projet R&D européen avec un taux de succès relativement faible.

Il serait nécessaire de rendre ces démarches plus accessibles, en évitant que la charge financière ne pèse sur les start-ups.

C’est un vrai sujet de politique industrielle pour la nouvelle composition de la Commission européenne et le prochain AI Action Summit en France (10-11 février 2025) permettra peut-être de remonter ce type de préoccupation.

En termes de prospective dans les neurosciences, que pensez-vous des progrès réalisés par la start-up Neuralink d’Elon Musk et sa R&D sur des implants cérébraux d’interfaces directes neuronales ?

C’est important de faire la part des choses. Il existe un vrai intérêt médical des neurotechnologies, par exemple dans le traitement des maladies neuro-dégénératives pour les personnes atteintes de la maladie de Parkinson.

Avec Elon Musk, l’intention est autre et elle me questionne : une vision de transhumanisme qui prime pour augmenter l’humain et optimiser ses performances cognitives ou émotionnelles.

Au-delà de la technologie, il s’agit d’abord d’une question d’éthique : a-t-on vraiment envie de vivre dans une société qui va dans ce sens ? Je suis partisan d’une approche très réglementée qui prendra en compte la dimension éthique avant tout, et on peut se réjouir que les dernières réglementations européennes soient au rendez-vous.

Concepts clés et définitions : #DRH ou directeur des ressources humaines